Le premier juillet dernier démarrait l’exposition « Pompéi » au Grand Palais. J’ai donc eu envie d’écrire mes premiers articles sur cette cité romaine détruite à la suite de l’éruption d’un Vésuve déchaîné. Néanmoins, si la destruction de la ville est un épisode assez connu, les origines et le quotidien des habitants de Pompéi sont assez mystérieux. C’est cet aspect que je vais aborder dans ce premier article.
Des origines à la conquête romaine
Pour commencer, quelle est donc l’origine de cette ville ? D’après les connaissances actuelles, Pompéi aurait été fondée au VIIème siècle av. J.-C. par un peuple italien assez méconnu : les osques. Durant les premières années, la ville va connaître une forte influence grecque que l’on retrouve encore aujourd’hui par l’intermédiaire du temple d’Apollon situé au sud-ouest de l’ancienne cité. Durant les siècles suivants, la ville sera le théâtre d’une lutte d’influence entre Cumes (cité grecque voisine de Pompéi) et un autre peuple italien : les étrusques.
Ce n’est qu’en 80 av. J.-C. que Pompéi sera conquise par le général romain Sylla. Néanmoins, contrairement à d’autres villes vaincues par les romains, la cité ne sera pas mise à sac et prendra le noms de « Colonia Cornelia Veneria Pompeiana » (en français : colonie cornélienne de Pompéi sous la protection divine de Vénus). Le soulagement des habitants sera toutefois de courte durée, car quelques années plus tard, la ville verra arriver près de 2000 anciens soldats de Sylla qui s’installèrent dans la ville avec leur famille. Cet afflux massif de nouveaux arrivants permit de romaniser petit à petit la ville. Ainsi, le latin remplaça l’osque en tant que langue officielle, des thermes et un amphithéâtre furent construit et d’une manière plus générale, Pompéi commença à s’organiser, comme la plupart des colonies romaines, autour de deux axes : le Cardo (axe nord-sud) et le Decumanus (axe est-ouest).
La vie de la cité
Durant sa période romaine, l’importance politique de Pompéi sera très limitée bien que la ville soit située à seulement 200km de Rome. Néanmoins, comme dans les autres villes romaines, le pouvoir politique était aux mains des membres de la riche bourgeoisie qui avait les moyens de financer les campagnes politiques (en organisant par exemple des combats de gladiateurs). On a ainsi retrouvé de nombreux messages politiques sur les murs de la cité qui décrivaient les noms des candidats, leur slogan et les personnalités qui les soutenaient. Ces élections permettaient alors aux citoyens (ce qui excluait les femmes, les enfants et les esclaves) d’élirent leurs représentants :
- deux duoviri (qui dirigeaient la vie de la cité)
- des édiles (qui géraient la voirie, l’entretien des bâtiments et la police des rues).
Au-delà de son poids politique, la bourgeoisie composée de grands propriétaires terriens possédait des villas richement décorées par de somptueuses fresques colorées, des boutiques et des champs dans lesquels travaillaient des hommes libres et des esclaves. Ces-derniers avaient un profil bien plus varié que l’on ne l’imagine. Ainsi, si certains étaient relégués aux travaux domestiques ou dans les champs, d’autres, plus chanceux, travaillaient comme rédacteur ou dans les boutiques de leur maitre. Au-delà des rôles de chacun dans le monde du travail, il est aussi intéressant de noter que contrairement à notre époque, les archéologues n’ont pas trouvé de traces de zonage social* à Pompéi où de riches villas étaient souvent voisines de maisons beaucoup plus modestes. Cela explique sans doute que l’on n’est pas retrouvé de trace de quartier pauvre ou d’Insulae (forme d’habitat collectif occupé par des populations modestes) dans les ruines de l’ancienne cité.
Afin de divertir cette population, Pompéi possédait deux théâtres et un amphithéâtre. Ce-dernier, situé au sud-est de la ville et pouvant accueillir jusqu’à 20 000 spectateurs, fut l’un des premiers amphithéâtres permanent construit par les romains. Il fut érigé aux alentours de 80 av. J.-C. grâce à la générosité des deux premiers duoviri : Caius Quinctius Valgus et Marcus Porcius. Cet édifice impressionnant sera pourtant le théâtre d’un évènement tragique. En effet, en 59, durant un spectacle de gladiateurs donné par Livineius Regulus dans le grand amphithéâtre de la ville, les habitants de Nocera et de Pompéi vont s’affronter lors d’émeutes meurtrières. Suite à ces troubles, Néron, alors empereur, fera interdire pour dix ans les combats de gladiateurs à Pompéi et l’organisateur des festivités sera puni d’exil.
Une économie agraire
La principale source de richesse de Pompéi était son intense activité viticole. Cette dernière était favorisée par la fertilité des terres volcaniques située sur les flancs du Vésuve ce qui permettait à la ville d’exporter son vin dans tout l’Empire. Dans une moindre mesure, les champs entourant la ville étaient également couverts de céréales, d’oliviers et de troupeaux qui fournissaient le fumier nécessaire à la culture des vignes. Le vin était alors exporté dans des amphores, principalement en Gaule. On a cependant trouvé des amphores provenant de Pompéi dans tout l’empire comme par exemple sur l’ancien site de la ville de Carthage. En parlant de commerce, il est aussi difficile d’évoquer Pompéi sans parler du Garum. Cette sauce de poisson fabriquée à base de diverses parties de poissons semblait très apprécié par de nombreux romains. Cette sauce (ou condiment) était l’une des principales spécialités de Pompéi et a permis à l’un de ses citoyens, Aulus Umbricius Scaurus, de s’enrichir considérablement.
Néanmoins, au-delà de son activité commerciale, la production vinicole servait aussi à combler la clientèle locale. En effet, Pompéi a longtemps été réputé pour le grand nombre de débits de boissons que comptait la ville. Ainsi, entre 150 et 200 établissements ont été découvert durant les fouilles. Néanmoins, au vu de la population de la ville (12 000 habitants), il semble peu probable qu’une ville de cette taille ait compté autant de tavernes. L’historienne britannique Mary Beard pense qu’une partie de ces établissements jouaient le rôle d’épicerie ou de magasin divers. De plus, dans certaines tavernes, il est probable que des serveuses ou des tenancières aient couché avec des clients pour de l’argent. En effet, il est difficile de parler de Pompéi sans évoquer la prostitution car l’antique cité comptait de nombreuses prostituées (souvent des esclaves) comme le prouve les nombreux messages de fierté ou de satisfaction laissés sur les murs par des clients de divers dans divers établissements. La généralisation de la prostitution rend d’ailleurs difficile l’identification des bordels car de nombreuses peintures érotiques et graffitis à connotation sexuels ont été retrouvé dans ce qui ressemble plutôt à des boutiques ou à des bars. Toutefois, il y a un bâtiment situé non loin des Thermes des Stabies qui comprend plusieurs chambres, de très nombreux graffitis (ex : « J’ai baisé ici ») et des peintures érotiques. D’après Mary Beard, la combinaison de ces trois caractéristiques est unique à Pompéi et ferait de ce bâtiment le seul lupanar officiellement identifié à ce jour.
Dans le prochain article, je passerai au passage le plus connu de la vie de Pompéi : sa destruction. En attendant, n’hésitez pas à me laisser vos commentaires !