Bien qu’il n’ait pas été le dernier château occitan à tomber, Montségur occupe une place à part dans l’imaginaire collectif. Se dressant fièrement sur un piton rocheux (le “pog”) du massif du Saint-Barthélémy, ce château, refuge des cathares du Midi, est aujourd’hui encore un symbole chargé d’histoire. Retour sur la résistance de cette citadelle mythique.
Un refuge autant qu’un symbole
À la fin du XIIème siècle, l’Eglise de Rome s’inquiète de la montée en puissance du catharisme dans le midi de la France. Conscient qu’une répression militaire semble inévitable, les cathares prennent les devants et se rapprochent de Raimond de Pereille, vassal du puissant comte de Foix. Ce dernier met à leur disposition les ruines situées au sommet du “pog” : il s’agît du château de Montségur. Une garnison s’y installe et rapidement, un village naît aux pieds des murailles. En effet, la croisade des Albigeois menée par Simon de Montfort puis Louis VIII fait affluer les réfugiés cathares en quête de protection.
En 1229, le traité de Paris-Meaux est signé et les conditions sont particulièrement dures pour les seigneurs occitans qui doivent désormais s’impliquer activement dans la lutte contre les hérétiques. De plus, Guilhabert de Castres, évêque cathare, fait de Montségur le siège de l’Eglise rebelle. Ces deux événements vont pousser de nombreux cathares à se rendre au château qui semble désormais être le seul refuge digne de confiance dans le midi de la France. Cependant, en 1242, un événement va remettre le feu aux poudres : le massacre des inquisiteurs de la ville d’Avignonet par des défenseurs de Montségur.
Le siège et la chute
Le massacre d’Avignonet lance un nouveau mouvement de révolte mené par les grands seigneurs de la région, notamment le comte de Toulouse, Raimond VII, soutenu par les vicomtes de Foix et de Béziers. Si les rebelles parviennent à s’emparer de Narbonne et d’Albi, ils se retrouvent rapidement isolés. En effet, Henri III, roi d’Angleterre, est vaincu par les troupes françaises alors que le duc de Bretagne, le comte de Provence et le roi d’Aragon, ne répondent pas à leurs appels à l’aide. Les châteaux de Quéribus et de Montségur deviennent alors les derniers refuges des cathares face à l’autorité royale désormais représentée par Saint-Louis.
Arrivés devant le château en mai 1243, les français se retrouvent dans une situation compliquée malgré une supériorité numérique écrasante (2000 contre 200). En effet, les catapultes et autres armes de jet ne parviennent pas à atteindre les murailles situées au sommet du “pog”. Un siège est alors mis en place, mais les assiégés parviennent à recevoir du ravitaillement grâce à de petits chemins de montagne et profitent des moindres averses pour remplir leurs citernes. Six mois plus tard, la situation est bloquée et les croisés lancent leur premier assaut en novembre 1243. Ces assauts répétés vont finir par venir à bout des assiégés qui, en février 1244, se retrouvent réellement encerclés.
Le 1er mars, les négociations commencent et les chefs rebelles demandent à négocier la reddition de la place auprès des croisés. Ces derniers sont las eux aussi et un compromis est rapidement trouvé. Moyennant une confession légère et l’abjuration de la foi cathare, les rebelles sont libres de quitter le château. En revanche, ceux qui refusent seront livrés aux flammes du bûcher. Ainsi, ils seront près de 200 à quitter le château le 16 mars 1244, enchaînés, vers le bûcher dressé en contrebas. Quelques années plus tard, en 1255, la dernière forteresse du midi, Quéribus, tombe et signe le glas du catharisme dans la région.
L’ère contemporaine et la redécouverte d’un site d’exception
Ayant perdu son rôle stratégique au fil des siècles, Montségur plonge progressivement dans l’oubli et tombe peu à peu en ruine. Il faut attendre le XIXème siècle et le mouvement romantique pour que les cathares et le château retrouvent de l’intérêt auprès du grand public et en 1862, la citadelle est classée au titre des monuments historiques. En 1934, un personnage singulier fait son apparition sur le territoire occitan : Otto Rahn. L’homme va alors écumer la région à la recherche… du Graal. En effet, l’homme qui rejoindra la SS en 1935 est persuadé que la légende de Parzival de Wolfram von Eschenbach* est véridique et que Montségur est en réalité le château de Montsalvage**. Ses recherches ne donneront rien et l’homme trouvera la mort en 1939 dans des circonstances mystérieuses.
Deux campagnes de restauration sont lancées entre 1948 et 1952, puis entre 1956 et 1958. Elles n’empêchent pas la multiplication des fantasmes liés au site, certains comparant le château à un temple solaire. Cependant, les différents mythes seront peu à peu démontés, d’abord par l’Épopée Cathare de Jean Duvernoy et Michel Roquebert, puis par les travaux archéologiques menés en 1975, 1986 et 1998. Ces fouilles et travaux ont permis de mieux comprendre l’histoire du site qui est aujourd’hui visité par près de 60 000 visiteurs chaque année.
* poète allemand du Moyen Âge, auteur de Parzival, œuvre basée sur Perceval de Chrétien de Troyes
** ou Montsalvat : château de la légende arthurienne où se trouve le Graal
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